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"Il faut me prendre comme je suis"

Dernière mise à jour : 5 mai 2022

Dans ce Classique de la littérature chinoise du XIVᵉ siècle, qu’est “Le singe pélerin*,

un Singe, un Cochon, un Dragon et un moine bouddhiste, vivent moult aventures.


Comme souvent dans ce genre de roman, le voyage est initiatique et les protagonistes révèlent leurs personnalités et talents à travers les épreuves rencontrées. Au final chacun en ressort positivement changé, les traits de caractères portés par chacun des personnages se modelant au feu des difficultés. Depuis Esope et La Fontaine, en passant par Orwell (The animals Farm), le procédé littéraire est connu : parler des animaux pour évoquer les travers de la nature humaine.


Au détour d’une page, je suis tombé sur cette affirmation mise dans la bouche de l’un des protagonistes :


“Grand sage, reprit le Dragon [s’adressant au Singe], il vous faut apprendre à vous dominer et à céder à la volonté d’autrui, si vous ne voulez pas gâter toutes vos chances d’aboutir” (p184)

La formule fit mouche.


Venant d’une famille dont les membres préfèrent donner des ordres plutôt qu’en recevoir, elle évoquait notre réticence à “céder à la volonté d’autrui” au nom de l’égo sacralisé. Nombre de fois j’ai eu l’occasion d’entendre certaines personnes affirmer d’un ton définitif “moi, il faut me prendre comme je suis”.


Exprimé autrement : je ne changerai pas, c’est au monde de s’adapter à ma personnalité. Vraiment ?

Cela sonne toujours à mon oreille comme un aveu d’échec, d’immaturité, ou de manque

d’ambition. Certes nous avons tous notre caractère, une personnalité affirmée, mais

pourquoi ne pas chercher à l’amender quand elle se révèle être un obstacle à la réalisation ?

de nos objectifs ?


Le monde ne changera pas. En revanche, vous pouvez faire l’effort de changer votre

perception des choses… Dans votre intérêt. Les interactions que nous avons avec les autres au sein des groupes que nous fréquentons, nous amènent à la composition, à la tempérance. Nous ne pouvons vivre dans un conflit permanent sur tous les sujets.


“Apprendre à vous dominer” : partie essentielle de l’éducation d’une personne.

L’individualisme occidental valorise à tout va l’expression des sentiments en public quand les asiatiques, majoritairement, encouragent le contrôle de soin et la réserve au nom du respect d’autrui.


Ne pas prendre l’autre morale délivrée par ce même roman est qu’on ne peut réussir seul. Chacun d’entre nous a des qualités qui se révèlent décisives pour la résolution de problèmes selon le moment et le lieu donnés. Nous avons donc besoin de tous nos talents et de ceux des autres.


“Apprendre à céder à la volonté d’autrui” pour ne pas gâcher ses chances d’aboutir, sans avoir l’impression de perdre la face ou son âme.

Après, tout est une question de distance à trouver entre vous et les autres, comme les

porcs-epic d’Arthur Schopenhauer (https://la-philosophie.com) mais cela est une autre histoire…


*“Le Singe pélerin ou le pélerinage d’Occident” (Wou Tch’eng-en-Petite Bibliothèque Payot-

2003)

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